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 Une guerre coloniale oubliée : le Rif, 1921-1926

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MessageSujet: Une guerre coloniale oubliée : le Rif, 1921-1926    Une guerre coloniale oubliée : le Rif, 1921-1926  I_icon_minitimeMer 20 Avr - 13:13

Une guerre coloniale oubliée : le Rif, 1921-1926
Une guerre coloniale oubliée : le Rif, 1921-1926  Arton454-130c1

La guerre qui oppose la République rifaine d’Abdelkrim aux Espagnols et aux Français entre 1921 et 1926 reste largement méconnue. Cette guerre coloniale, extrêmement violente, marque pourtant une étape décisive dans l’histoire de l’anticolonialisme et dans la construction de la nation marocaine.

Le 14 juillet 1926, la France du Cartel des Gauches rassemble sous l’Arc de Triomphe la coalition improbable des vainqueurs de la guerre du Rif : un superbe cliché, où semble tenir toute l’histoire de la IIIe République coloniale, immortalise Aristide Briand, président du Conseil, entouré d’Édouard Herriot, Paul Doumergue et Philippe Pétain, du dictateur espagnol Primo de Rivera et du sultan du Maroc Moulay Youssef. « C’est dans le même esprit de paix, avait affirmé Briand à la Chambre en décembre 1925, que nous entendons terminer dans un bref délai les affaires du Maroc et de la Syrie aussitôt qu’auront été réduites les agressions fomentées contre l’oeuvre de civilisation et de traditionnel libéralisme de la France » ; un an plus tard, victorieux d’Abdelkrim, il reçoit le prix Nobel pour son œuvre de réconciliation internationale. C’est bien une guerre et non une simple « affaire » qui s’est pourtant déroulée dans le Rif, dans laquelle la France a été engagée à partir d’avril 1925, mais que les Espagnols avaient déclenchée en 1920 sans parvenir à la terminer. Une guerre totale, moderne, et oubliée, que restituent avec passion deux auteurs, Vincent Courcelle-Labrousse et Nicolas Marmié. Leur propos, malheureusement, n’est étayé par aucune note de bas de page : malgré la qualité de l’ouvrage, l’administration de la preuve s’en trouve de ce fait affaiblie. Les deux auteurs, certes, ne sont pas historiens de formation. Mais une connaissance, même intime, du Maroc, acquise pendant de longues années d’exercice de leurs métiers respectifs d’avocat et de journaliste, ne peut suppléer à l’absence complète d’apparat scientifique.
Aux origines de la guerre du Rif

L’insurrection du Rif à partir de 1921 n’est pas un accident. Elle est la conséquence de la lente progression des Espagnols depuis le milieu des années 1900. En 1909 et 1910, les Espagnols avaient déjà subi une série d’humiliantes défaites, dont l’onde de choc s’était répercutée sur le continent. L’exécution de l’anarchiste Francisco Ferrer en octobre 1909 était la conséquence directe de la grève insurrectionnelle déclenchée en Catalogne contre le rappel des réservistes. C’est donc pour diviser l’ennemi que le Service espagnol des Affaires Indigènes, imité de son homologue français, finance largement un « parti de l’Espagne » et dérègle délibérément le jeu coutumier des relations entre tribus rifaines. L’étude de la stratégie espagnole de conquête du Rif est un aspect passionnant du livre

La tribu des Beni Ouriaghel, dirigée par le père d’Abdelkrim, est en effet le pilier de cette stratégie : celui-ci s’est engagé à ne pas mobiliser ses troupes et à favoriser les affrontements entre tribus rivales. Malgré le succès initial de cette redoutable politique, les Espagnols, incapables de débarquer en force au Maroc, ne peuvent assurer la sécurité de leurs affidés. L’empoisonnement de son père en août 1920 achève de pousser Abdelkrim à la révolte, au moment même où la conquête du pays semble à portée de main du général espagnol Sylvestre, installé à Melilla. Un an plus tard, en août 1921, le corps expéditionnaire et son chef ont disparu dans une effroyable débâcle, qui scelle l’un des plus grands désastres militaires subis par une armée coloniale.

C’est qu’entre-temps, le pouvoir rifain est né. Il s’est certes constitué grâce au talent d’un homme parvenu à faire oublier son passé de serviteur de l’Espagne. Pour rompre le jeu diviseur des rivalités tribales, Abdelkrim réislamise le Rif en lui imposant un ordre religieux rigoureux où le droit coranique remplace le droit coutumier. Mais cette république éphémère incarne aussi la seule issue offerte au Rif, entre l’encerclement colonial et l’impuissance tribale. Le charisme d’un homme du pays élevé à l’école espagnole et la force de sa tribu ont joué ; mais il a fallu l’idée d’indépendance, bientôt soutenue par la légitimité religieuse et militaire d’un nouvel émir dissident, pour unifier contre l’ennemi ancestral espagnol un peuple qui n’existe pas.

La revendication nationale rifaine a agité le petit monde révolutionnaire de France et d’Europe. Abdelkrim, pourtant, n’est pas communiste ; mais il comprend que cette agitation est un levier sur l’opinion française – peut-être sait-il déjà qu’une guerre coloniale se gagne en métropole. Les communistes, eux non plus, ne sont pas nationalistes, mais le Komintern leur enjoint de lutter pour l’indépendance des prolétariats coloniaux. Étrange dialogue de sourds, dont chacun finalement tire parti. Il est clair, en effet, que l’avènement du bolchevisme a renouvelé en profondeur non seulement les principes, mais aussi les pratiques de l’anticolonialisme. La surenchère communiste contraint d’ailleurs les socialistes à réviser progressivement leur attitude de soutien sans participation au Cartel ; les surréalistes aussi, de leur côté, prennent parti pour le Rif. « Notre première prise de position fut une prise de position en somme anticolonialiste », devait ainsi affirmer Michel Leiris. Toute cette agitation efficace, fondée sur un malentendu, en dit long sur les ambiguïtés de l’anticolonialisme français, motivé en profondeur par le rejet de la société bourgeoise et la recherche de l’exotisme plutôt que par la connaissance positive du Maghreb.

La « République du Rif »

Comme le soulignent avec raison les deux auteurs, le régime éphémère fondé par Abdelkrim dans les montagnes du Rif n’a de république que le nom. Il s’agit en réalité d’une organisation politique qui repose entièrement sur la primauté des Beni Ouriaghel. Les Rifains ne sont pas une nation, mais une constellation de tribus d’origine berbère, privée de centre névralgique. L’intelligence d’Abdelkrim est d’être parvenu à regrouper ces tribus autour de lui en une fédération qu’il tient d’une main ferme, voire brutale lorsque nécessité fait loi. Pour cela, il bénéficie d’un outil de gouvernement efficace et fidèle, dont les chefs sont puisés directement dans son clan, mais où l’on retrouve aussi une poignée d’Européens, marginaux fascinés par le personnage ou déserteurs gagnés à sa cause, qui offrent à son armée une expérience et une formation irremplaçables. D’une efficacité redoutable pour mener la guerre à l’intérieur du Rif, cette organisation tribale chapeautée par un embryon de gouvernement découvre ses faiblesses lorsqu’elle doit se projeter à l’extérieur : pour vaincre, Abdelkrim est obligé de gagner à ses vues, de gré ou de force, les tribus qui le séparent de Fez, auréolé de son statut de ville sainte, véritable enjeu de la guerre qui entre dans sa phase finale avec l’attaque rifaine contre les postes français en avril 1925.

Le pouvoir rifain d’Abdelkrim se nourrit de la guerre. Mais de quelle guerre s’agit-il ? D’une guerre d’indépendance, incontestablement. On aimerait que les auteurs nous en disent plus sur les origines du nationalisme marocain, car la revendication du droit des Rifains à disposer d’eux-mêmes est sans ambiguïté. Quel chemin cette revendication a-t-elle emprunté pour être formulée au début des années 1920 avec une telle clarté ? Abdelkrim promet l’indépendance pour le Rif d’abord, pour tout le Maroc ensuite, s’il parvient à le conquérir. Déclenchée pour empêcher la soumission du Rif aux Espagnols, la guerre prend, au fil d’une implacable logique, une nouvelle dimension, dont Abdelkrim est prisonnier : après ses victoires retentissantes contre les troupes espagnoles, il ne peut plus s’agir seulement d’interdire le Rif à l’Espagne, mais de remporter un djihad contre le sultan du Maroc, solide allié des Français qui protègent son statut sacré de commandeur des croyants. Lyautey l’avait prévu : la victoire contre les Espagnols condamnait les Rifains à la guerre contre les Français. L’indépendance du Maroc et la déposition d’un sultan soumis aux étrangers s’imposent rapidement comme les véritables buts de guerre d’Abdelkrim. Le risque d’une contagion qui enflammerait le Maghreb est évident. Retranché dans les postes des hauteurs qui ceinturent le pays rifain, les Français ont observé une neutralité bienveillante à son égard, tant que son pouvoir ne nuisait qu’aux Espagnols. Tout change, dès lors que le chef rifain est devenu un émir menaçant la légitimité du sultan « ami de la France ». On hésite d’ailleurs à trancher sur la nature réelle de son pouvoir : s’agit-il du dernier descendant rifain des Almoravides et des Almohades, coulé dans les formes ancestrales de la dissidence religieuse et de l’art de la guerre berbères, ou au contraire d’un pouvoir moderne, nourri par les idées et les normes occidentales ? Abdelkrim est un véritable homme d’État, auréolé d’une grande dignité puisée du fond de l’Islam et qui fascine secrètement Lyautey. Il est un homme-charnière dans l’histoire du nationalisme maghrébin.

Une guerre totale

Abdelkrim gagne la guerre grâce à un redoutable outil militaire : il organise les bandes tribales traditionnelles autour d’un noyau de réguliers bien armés, bien encadrés et bien entraînés. Mais il manque la paix. Aucune puissance européenne, même vaincue comme le sont à nouveau les Espagnols en décembre 1924, lors du désastre de Chechaouen, ne peut accepter ce que demande Abdelkrim : « Nous considérons que nous avons le droit, comme toute autre nation, de posséder notre territoire, et nous considérons que le parti colonial espagnol a usurpé et violé nos droits, sans que sa prétention à faire de notre gouvernement rifain un protectorat ne soit fondée. […] Nous voulons nous gouverner par nous-mêmes et préserver entiers nos droits indiscutables ». La radicalité de sa déclaration des droits condamne la République du Rif à l’anéantissement.

Le conflit revêt immédiatement une brutalité inouïe. Les Rifains victorieux mettent à mort les garnisons espagnoles qui se rendent. Le Tercio de Estranjeros, formé en 1920 et commandé par Franco à partir de 1923, répond par une violence radicale nourrie par un racisme viscéral et par le besoin de gloire frustré des africanistas. Les formes traditionnelles de mise à mort se mêlent à la brutalité exercée envers un ennemi d’autant plus détesté qu’il est insaisissable et perçu comme arriéré. Pour réduire la résistance des vallées rifaines, les gaz de combat sont massivement utilisés par les Espagnols, qui se sont dotés d’un arsenal chimique grâce à un programme lancé avec l’aide allemande en 1921. Lyautey, le grand oriental, sollicite lui aussi l’utilisation de munitions chimiques pour enrayer l’offensive rifaine en 1925. Paul Painlevé, alors président du Conseil, tergiverse, lui accorde ces munitions, qui ne parviennent jamais au Maroc : leur usage serait à l’évidence politiquement catastrophique. C’est une guerre de siège, au fond, que doit soutenir Abdelkrim malgré ses victoires : il a nettoyé le massif des Européens, mais il doit en sortir pour vaincre.

Faut-il voir dans cette radicalité une conséquence de la Première Guerre mondiale ? Ce n’est pas évident. L’Espagne est un pays neutre pendant le conflit ; la guerre était déjà présente dans le Rif avant 1914. Éparpillée dans les postes qui ceinturent le pays rifain, l’armée française de Lyautey n’est pas une armée de métropole. Y aurait-il de ce fait un type propre aux guerres coloniales ? Elles revêtent, il est vrai, des formes d’une brutalité particulière. L’extermination par la faim, envisagée par les Espagnols, possède au moins un précédent, mis en œuvre par les Allemands en pays Herero, dans le Sud-Ouest Africain, au milieu des années 1900. Ce qu’Hannah Arendt appelait l’« impérialisme » génère-t-il une forme de violence spécifique ? Ou faut-il l’attribuer à des facteurs circonstanciels – l’éloignement des théâtres de conflits, la puissance des représentations racistes de l’ennemi, la persistance de formes traditionnelles de guerre et de mise à mort ? Les deux auteurs, qui développent assez longuement les aspects militaires de la campagne du Rif, n’entrent malheureusement pas dans ce débat.

C’est pourtant une armée européenne, formée à l’épreuve de la Grande Guerre et dirigée par Pétain, qui met un terme à la guerre par l’écrasement massif et systématique de la rébellion rifaine. Largement équipée en artillerie et en aviation, le corps expéditionnaire français reçoit, dès la nomination de Pétain, des dizaines de milliers d’hommes en renfort ; c’est un corps d’armée qui reconquiert le Rif à la petite harka d’Abdelkrim – 5 000 guerriers tout au plus. Une reconquête urgente, mais qui n’est pas aussi facile que l’escomptait Pétain, qui a écarté Lyautey auquel Paris avait toujours refusé les hommes nécessaires à une vraie guerre, et non à une « affaire ».

En mai 1926, la guerre est terminée. Il est difficile d’évaluer le nombre des victimes chez les Rifains, mais il est incontestablement élevé, tant chez les civils que chez les combattants. Abdelkrim lui-même est envoyé en exil à Madagascar. Il devait s’en échapper vingt ans plus tard, lors d’une escale à Port-Saïd pendant un transfert. Mais son rêve est mort : « J’ai vu mes idées s’évanouir l’une après l’autre. Comme dans beaucoup de pays d’Orient, l’arrivisme, l’esprit de corruption se sont introduits dans notre cause nationale ». Quel aurait été son Maroc ? En 1925, c’était de toute façon un Maroc impossible. La guerre du Rif est un coup de semonce, plutôt que l’achèvement de la difficile conquête du Maroc par les Européens. Lyautey se retire de la scène en même temps qu’Abdelkrim, tous deux murés dans une splendide amertume. Le Maroc moderne n’est pas qu’une création française ; il n’est pas non plus sorti d’une guerre d’indépendance victorieuse. Il est le fruit d’une synthèse improbable, entre la tradition plusieurs fois séculaire des sultans alaouites portée par le fait national et la modernité occidentale, imposée par le fait colonial.


Romain Ducoulombier
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